C’est vrai que je suis plutôt anti-écran, dans le sens où je pense qu'il faut que les enfants les découvrent le plus tard possible. Finalement, si c'est discuté, partagé, expliqué et accompagné pourquoi pas.
La question des écrans : en discuter à l'école avec les parents et les enfants
Tous les élèves de la classe de CP de l’école Bercy à Paris dans le 12ème arrondissement ont relevé le défi ce week-end : dessiner leur écran préféré à la maison dans le carnet intitulé “Les écrans et moi”.
“Celui que je préfère, c’est la Switch”, affirme Leila* en brandissant fièrement son dessin . "Comme moi”, ajoute Arthur*. “Moi, c’est la télévision mais je n’ai pas vraiment choisi car il n’y a que cet écran là à la maison”, précise Élodie*. Quand à Amed*, il préfère l’ordinateur parce qu’il lui permet de jouer et de regarder des films ou vidéos en ligne.
Dans cette école classée Convention académique de priorité éducative (CEPA), Alexandra fait le constat que les élèves arrivent très souvent fatigués à l’école. Après une enquête rapide et informelle , elle se rend compte que les écrans sont très présents dans le quotidien des enfants: durant les repas, dans la chambre, que beaucoup possèdent déjà un téléphone portable ou l’utilisent régulièrement.
“Lorsque l’on m’a proposé de participer au parcours ÉCRANS** des Ceméa Ile de France, j’ai tout de suite été séduite”, se rappelle-t-elle. Cela fait maintenant quatre ans qu’Alexandra participe et co-construit ce projet. “L'objectif est que les familles se rendent compte de la place que prennent les écrans au quotidien, de les sensibiliser sur ce que les élèves peuvent faire avec, comment en garder le contrôle, comment mieux vivre avec.” Les écrans sont un sujet qui cristallisent souvent les tensions et les doutes. Pour Eva Hurel-Sicard, responsable du pôle des Politiques Éducatives, Médias & Culture aux Ceméa Île-de-France, “il ne s’agit pas d’avoir un discours moralisateur avec un contenu exposé par des “sachants” mais de mettre en place une pédagogie active où chacun et chacune peut s’exprimer, échanger sur le vécu sans culpabiliser. L’objectif est de faire réfléchir, développer l’esprit critique, s’entraider, trouver des pistes pour faire en sorte que le sujet des écrans ne soit pas facteur de tensions”.
Des cafés des parents sur les écrans pour échanger
Pour cela, les Ceméa proposent la tenue de cafés des parents sur le thème des écrans. A l’école de la Brèche aux loups, alors que les élèves se rendent en classe, les parents sont invités à participer à des ateliers.
Théophile Hladky - en charge de la mission éducative médias, information et numérique des Ceméa national- anime celui sur le système PEGI, un système de classification des jeux vidéos. "Il s’agit de permettre aux parents d’avoir des repères mais aussi découvrir que certains jeux sont déconseillés aux moins de 12 ou 16 ans, de savoir ce que font leurs enfants lorsqu’ils jouent à certains jeux vidéo, ce qu’ils y trouvent afin qu’ils puissent faire des choix éclairés".
Yassine, parent d'élève
Lors de cet atelier, certains parents découvrent que leur enfant joue à des jeux parfois violents et pas du tout adaptés à leur âge.
Anne, maman d'une enfant en CE1 et d'une autre en cinquième, confirme ce que dit Théophile: “ On a toujours des inquiétudes, on se pose toujours beaucoup de questions surtout vis à vis de notre grande qui en cinquième avec laquelle on est en conflit permanent : elle n'a pas de téléphone alors que tous les petits copains en ont un. On apprécie de pouvoir parler de ces sujets avec des professionnels”.
Dans l’atelier d’à côté, la psychomotricienne Marie Canavesio invite à la discussion, avec comme support des photos, sur la place des écrans dans le foyer et le temps qui y est consacré. Pour Yassine, papa de Judith, qui a presque huit ans, le café des parents est aussi l’occasion de voir le sujet des écrans sous un nouvel angle. “C’est vrai que je suis plutôt anti-écran, dans le sens où je pense qu'il faut que les enfants les découvrent le plus tard possible. Finalement, si c'est discuté, partagé, expliqué et accompagné pourquoi pas”.
Dans le troisième atelier, c’est un jeu de plateau sur les réseaux sociaux qui permet la discussion. Mais si le sujet des écrans interpelle et que des pistes sont lancées pour en permettre un usage raisonné, les Ceméa et les équipes d’école devront innover afin de toucher davantage de familles. Ces rendez-vous à l'école restent en effet des espaces fréquentés par des parents sans doute déjà sensibilisés au sujet. Les équipes travaillent aujourd'hui autour d'événements liés aux restitutions de productions d'élèves en fin d'année, lesquels pourraient être des espaces privilégiés pour en parler.
*les prénoms ont été modifiés
** Education Critique Au Numérique & Santé