Dans une perspective inclusive, penser autrement le handicap

Précisons d’abord que notre réflexion se nourrit – nous pourrions dire « naturellement » – de la pensée des Lumières, ce mouvement philosophique qui a traversé l’Europe au XVIIIe siècle : plus particulièrement, de Diderot et de sa Lettre sur les aveugles à l’usage de ceux qui voient ; de Rousseau et de son Discours sur l’origine et les fondements de l’inégalité parmi les hommes ; bien sûr, de Kant et de la devise des Lumières : « Sapere aude ! Aie le courage de te servir de ton propre entendement », de penser par toimême, en t’affranchissant des peurs chimériques, des fausses croyances, des préjugés et des autres conditionnements. Cette référence aux Lumières est liée à ce qui a été lumineux en elles : leur capacité à s’élever contre tous les dogmes.

Dans le champ qui nous préoccupe, les Lumières invitent à concevoir le handicap comme ce qui mérite d’être pensé autrement et, simultanément, de recevoir sa dignité de la pensée.

Or, face à cette expression de la diversité et de la fragilité humaines, dans quelle mesure sommes-nous encore, femmes et hommes des Lumières, dans la « défaillance », la « réflexion attardée », éloignés d’une pensée, voulue comme lumière ? En quoi avons-nous encore à nous affranchir, dans les domaines de l’école, du travail et bien d’autres, d’obscurantismes persistants : ignorances, superstitions, fausses croyances, stéréotypes, représentations collectives figées et autres habits de l’hétéronomie que dénonce Kant dans sa Critique de la faculté de juger ?

Tout se passe en effet parfois comme si nous demeurions dans la prison des catégorisations, des conventions, des préjugés communs, dépourvus de la capacité à sentir autrement, à réinterroger et à admettre la vie multiforme autour de nous (...)