LA MÉDIATHÈQUE ÉDUC’ACTIVE DES CEMÉA

Le travail social, un enjeu politique

Dans un but d’émancipation, d’accès à l’autonomie, de protection et de participation des personnes, le travail social contribue à promouvoir, par des approches individuelles et collectives, le changement social, le développement social et la cohésion de la société
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Média secondaire

« Le travail social vise à permettre l’accès des personnes à l’ensemble des droits fondamentaux, à faciliter leur inclusion sociale et à exercer une pleine citoyenneté. Dans un but d’émancipation, d’accès à l’autonomie, de protection et de participation des personnes, le travail social contribue à promouvoir, par des approches individuelles et collectives, le changement social, le développement social et la cohésion de la société. Il participe au développement des capacités des personnes à agir pour elles-mêmes et dans leur environnement. »


 

Quelques constats de départ

Les plus vulnérables au cœur des difficultés importantes et souvent multiples

Les constats sont partagés pour rappeler que le contexte socio-économique renforce la fragilité des plus vulnérables. Les difficultés sont multiples et souvent entrecroisées, rendant la situation des individus encore plus complexe (accès à la formation et/ou à l’emploi plus difficile, difficultés à trouver une place et à exister au regard de la société, etc.).

En fait, constat peut être fait que la société, est elle-même en souffrance et déstabilisée et ne réussit pas/plus à prendre en compte les plus fragiles (société excluante et basée sur la rentabilité et l'argent, et la performance). Cette approche conduit à considérer les plus vulnérables comme des individus en marge ou marginalisés et qui ne sont observés et regardés que dans leurs difficultés et pas dans leurs potentialités.

La marchandisation du social, en route

Par ailleurs, nous pouvons constater qu’une marchandisation imposée du travail social (appel à projets, appels d'offre) et une approche libérale du travail social (renforcement de l’approche individuelle au détriment du collectif par exemple),qui invite à la mise en concurrence des acteur.rice.s pouvant amener à mettre de côté la dimension politique, pour survivre. Cela veut donc souvent dire focaliser son action sur les personnes les moins en difficultés, celles qui réussiront le moins difficilement à s’en sortir, souvent au grand désespoir des professionnel.le.s eux.elles-mêmes.

 

Une problématique prégnante : le travail social porteur de valeurs en toile de fond, pour construire une société plus juste, mais dans un contexte de tiraillement fort

Les éducateur.rice.s agissent le plus souvent, avec en toile de fond des valeurs et des principes forts (volonté d’émancipation et de transformation sociale, prise en compte de chacun.e, etc.). Il s’agit alors de mettre en œuvre un projet politique en direction des publics les plus fragiles, pour leur permettre de prendre une place, en étant associé.e.s et pris en compte dans leur singularité, leurs difficultés, mais aussi leurs potentialités.

Cependant le contexte qui est imposé aux travailleur.euse.s sociaux.ales rend palpable une tension forte entre la volonté de marchandisation du secteur de l’intervention sociale (renforcement des appels d’offre, volonté de renforcer prioritairement l’accès des individus à l’emploi durable, etc.), l’approche libérale (accompagnement vers la réussite individuelle, etc.) et le projet politique de l’intervention sociale qui souhaite promouvoir l’émancipation et la liberté des individus. En effet, ce projet nécessite de prendre du temps pour être dans l'AGIR avec les personnes, ce qui peut être en opposition avec le modèle de l'efficience immédiate (ou rapide) prônée par la pensée libérale et capitaliste. Il s’agit alors de renforcer l’action collective pour se réapproprier ce qui nous est commun et éviter alors la privatisation de ce qui est essentiel et appartenant à tous.tes. Les biens communs (matériels et immatériels) doivent en effet rester en permanence en toile de fond de l’action et de l’engagement, afin de ne pas être enfermés dans une logique commerciale et mercantile, mais bien d’œuvrer dans une dimension de biens partagés et accessibles à tous.tes.

Une volonté exprimée de résister

La formation en travail social, une occasion de mettre en œuvre des principes

Chacun·e s’accorde à penser et rappeler que former des éducateur.rice.s, c’est s’inscrire dans un projet politique (cf. ci-dessus). Cela veut donc dire proposer à chacun·e des stagiaires, chaque étudiant.e, la possibilité de construire une pensée qui prenne en compte ce qu’il.elle est, d’où il.elle vient, quelles sont les possibilités et ses difficultés et ceci afin d’inscrire son parcours et son action éducative dans du sens et des valeurs.

La formation doit donc être en mesure de proposer des espaces de réflexion et de création collective qui permettent de construire et de penser sa pratique. Cela veut donc dire favoriser l’accès de chacun·e, quelles que soient ses difficultés de départ (relation à l’école et aux apprentissages, relations aux savoirs et à l’écrit, etc.), à une formation qui vise à l’émancipation et à la transformation. Vivre de tels espaces, c’est aussi construire des références pour l’après, quand ils.elles seront éducateur.rice.s auprès de publics fragiles.

La formation est donc un formidable espace, pour expérimenter, construire des propositions, s’essayer à la démocratie participative, etc. C’est en cela qu’un projet de formation est politique. Il ne s’agit uniquement de proposer des espaces d’acquisitions techniques, mais bien aussi de proposer une possibilité de « se penser » et de penser sa pratique de jeunes professionnel·le·s. Cela veut donc dire travailler la question de l’engagement, maintenant et plus tard.

En d’autres mots, cela veut dire penser que la formation des travailleur.euse.s sociaux.ales participent à ce projet d'émancipation: penser son histoire, regarder son parcours, acquérir des compétences, construire des savoirs. Mais il est important que nos espaces de formation permettent et favorisent l'expression et la prise de parole, pour être en responsabilités. Il ne s'agit pas uniquement "d'ingurgiter", mais bien de comprendre, mettre en perspective et être "partie prenante", dans ce qui est construit et proposé (élaboration collective/ prise en compte du langage et du sens des mots, pour créer du commun).

Vivre cette dynamique en tant que professionnel.le ou futur.e professionnel.le, pour être en capacité de la faire vivre par la suite, ainsi les aller-retours entre penser et agir sont nécessaires, pour faire des liens, ne pas nier ce qui est en jeu, ce qui fait notre parcours, notre histoire. Il s’agit bien ici d’inviter les individus à être eux.elles-mêmes en réflexion sur la manière d’agir et de quelles manières (construction de projets, etc.), mais aussi de ne pas éluder la question de la résistance, face aux pouvoirs, à des dispositifs, etc. qui peuvent les « empêcher » de prendre une place, qui s’appuient plutôt sur des processus de domination et qui ne laissent aucune place à la création collective, aux pas de côté, etc.

De la formation à l’action de terrain

Nous postulons que le cadre proposé pour la formation des profesisonne.le.s de l’intervention sociale, leur permettra ensuite d’agir de manière « politique » auprès des publics les plus vulnérables, en privilégiant l’action avec et pas « pour », en soutenant leur implication citoyenne en tant qu’acteur.rice engagé.é et pas seulement « bénéficiaire » de politiques publiques. En d’autres termes, favoriser la mise en mots, la prise de parole des individus, pour qu'ils.elles soient en responsabilités et partie prenante de la société.

Cela oblige collectivement à (Re)penser les manières de travailler et réinvestir le sens de l'action. C’est bien là que ce situe le projet politique du travail social. Il s’agit par ailleurs d’ancrer son action dans la réalité quotidienne et spatiale en renforçant sa compréhension du contexte et le territoire, pour agir (parfois en s'opposant, mais en ayant compris). Cela veut dire également que l’action de peut être pensé de manière isolée, mais bien articulée avec les différent.e.s acteur.rice.s, afin de travailler la complémentarité d'analyses et d'actions.

Penser et construire l’action dans une dimension européenne et internationale, grâce à la rencontre interculturelle

Être Travailleur.euse social.e en France, en Italie ou encore en Allemagne, c’est s’inscrire dans le cadre de politiques sociales nationales. Mais est-ce suffisant ? En effet, les acteur.rice.s de l’intervention sociale sont aujourd’hui confronté.e.s à des problématiques qui dépassent les frontières. En effet, les questions migratoires (économiques, climatiques, liées à la guerre,etc.), les politiques socio-économiques européennes, etc. obligent chacun.e à regarder au-delà de ses habitudes ! Il est aujourd’hui nécessaire et indispensable de prendre en compte ses dimensions, comprendre l’autre dans ses différentes dimensions (culturelles, historiques, traumatiques, etc.), pour l’accueillir et l’accompagner de la meilleures manière.

Tout comme il s’agit d’articuler sa pratique avec les autres acteur.rice.s d’un territoire, il est important d’inscrire son action dans une contexte élargi. Les rencontres inter-culturelles (voyage d’étude, période d’immersion, volontariat européen, etc.) sont un moyen important d’ouvrir les horizons, d’analyser différemment ses pratiques et ainsi de les enrichir. Si aller vers l’autre est important, il est également nécessaire d’accueillir les autres (bénévoles, professionnel.le.s) pour entendre et partager leur regard et leur expérience dans nos actions quotidiennes ■


Montrer le travail social ?

Un article de Rozenn Caris, avec les apports et conseils de Nahima Laieb, David Ryboloviecz et Joseph Rouzel

dans VST - Vie sociale et traitements 2019/2 (N° 142), pages 3 à 4

Revue Vie Sociale et Traitement numéro 142

 

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